AND ALSO THE TREES, 2017 Existe-t-il l’endroit où photographier sans altération ? Je me déplace depuis plusieurs jours et chaque prise de vue s’inscrit dans une tension – effondrements, déclivités, obscurcissements. Tout m’apparaît comme une lente défiguration. Existe-t-il l’endroit où ces photographies pourraient connaître un corps plus avenant ? Est-ce un endroit précis, fixe – une clairière, un havre ? Ou est-ce moi, qui me suis épris d’une vitesse, d’une frénésie qui n’offrent aucun repos? À chaque occasion, m’éloignant pour des déplacements volontaires, des instants de solitude choisie, je traverse des paysages pour en saisir d’autres à l’intérieur. Je découpe du paysage dans du paysage. Mon œil est en mouvement, chargé d’une capacité presque enivrante à repérer au loin des formes, les laisser s’avancer, se préciser, s’harmoniser (du moins ai-je cette impression puisque j’éprouve une sorte de consentement en les approchant ; photographier à cet instant ce qui paraît s’éterniser me donne comme des frissons d’intelligence – ou du moins me fait ressentir un accord, le plaisir d’une coïncidence qui n’a rien de forcée même si elle est provoquée).
Is there such a thing as a place to photograph without alteration? I've been on the move for several days now, and every shot I take is part of a tension - collapses, declivities, obscurations. Everything appears to me as a slow disfigurement. Is there a place where these photographs could be given a more appealing body? Is it a specific, fixed place - a clearing, a haven? Or is it me, in love with a speed, a frenzy that offers no rest? At every opportunity, moving away for voluntary displacements, for moments of chosen solitude, I cross landscapes to capture others within them. I cut landscape into landscape. My eye is on the move, charged with an almost intoxicating ability to spot shapes in the distance, let them come forward, become clearer, harmonize (at least I have this impression, since I feel a kind of consent in approaching them; photographing at this moment what seems to be going on forever gives me a kind of shiver of intelligence - or at least makes me feel an agreement, the pleasure of a coincidence that is in no way forced, even if it is provoked).